Me voilà, une fois encore, confrontée à la lourde tâche qu'est la rédaction d'un article. Trois semaines de silence et déjà le sentiment de m'être laissée submergée par les évènements. Trois semaines intenses, seulement rythmées par mon nouvel adage: "oui, je peux voyager en solitaire!"
Je vous laissais donc, il y a peu, aux portes de Vancouver. Entrons-y dès maintenant, ça vaut le détour! Enchevêtrement de contrastes, cette ville a quelque chose d'exaltant! Son cadre est sublime. L'océan Pacifique (que je contemplais pour le première fois!) côtoie les forêts denses qui rivalisent, par leur hauteur, avec les buildings, eux même ridiculement petits face aux monts enneigés qui ceinturent la cité.
(Je précise un truc tout bête mais certains de mes fidèles lecteurs l'ignoraient... si vous cliquez sur les photos, elles sont bien plus grandes! Et on les voit ben mieux! J'dis ça, j'dis rien!)
Mais Vancouver c'est aussi une découverte abracadabrante: Wreck beach! Une plage où puritanisme et convenances prennent une sacré claque! Située sur le campus de l'Université de British Colombia, elle accueille un joyeux melting-pot... de gens tout nus! Mais pas que! Sans le haut, sans le bas, en tenue d'Eve, en imperméable, en poncho... peu importe tant qu'on s'amuse! Des vieux hippies, des étudiantes, des stands de bouffe péruvienne, de vêtements en chanvre, des guitares, des percus, l'odeur suave des joints qui tournent, celle, plus acre, de la bière qui coule à flot, un coucher de soleil... et toujours les montagnes. Tiens! Un monsieur joue de la trompette... tout nu. Ah et lui là bas... qui fait de la balançoire! Tous les tableaux les plus cocasses sont réunis à Wreck beach.
Les photos n'y sont malheureusement pas tolérées... Les quelques unes prises à la va-vite ne donnant pas grand chose, je laisse à votre imagination le soin de vous emmener là bas!
C'est le lendemain de cette belle journée que Floriane me quitte. S'ensuivent deux jours au fond du gouffre, entre larmes et remise en question. Mais une Alicia qui se respecte, c'est une Alicia qui rebondi et qui fonce! Ni une ni deux, je quitte l'appartement dans lequel j'étais hébergée et me dégote une auberge de jeunesse. La priorité? Ne pas rester toute seule! Choix qui s'est vite avéré être le bon puisque quelques heures plus tard je mangeais un gros burger avec ma coloc de chambre!
Le lendemain, c'est notre ami Paul, cycliste rencontré dans les Rocheuses trois semaines plus tôt qui me retrouve. Il deviendra vite celui que j'appellerai "mon petit Anglais"... Nous prenons le ferry pour Vancouver Island et y passons deux jours ensemble. Island View... un petit camping rudimentaire sur une jolie plage... il ne m'en fallait pas plus pour être aux anges!
Son vélo n'étant pas compatible avec mes pieds et mon pouce, nous nous séparons rapidement... peut-être un peu trop. Me revoilà livrée à moi même. Je fais fi des "règles" de sécurité établies jusque là et reprends le stop en solitaire direction Victoria, capitale de l'île.
J'en retiendrais deux choses: le meilleur fish'n chips ever, et ma rencontre avec Jacob, un Suisse longeant la côte ouest américaine. J'y prends le bus pour la seule et unique fois de mon voyage. Cap sur Port Alberni. Petite ville sans grand intérêt mais dans laquelle je suis tout de même restée 3 jours! La petite auberge du Fat Salmon s'est muée en home sweet home au moment où j'en avais le plus besoin. Balade en forêt, farniente et baignade à la rivière. Je me repose et apprends à apprécier ma propre compagnie. J'y fais aussi l'affaire du siècle en m'y dégotant une tente d'occasion à 12$! Yihhhaaa! Je vais pouvoir reprendre le camping! Et ça me ravie!
La solitude m'apparait tantôt comme un don du ciel, tantôt comme le pire des fardeaux. Pas de demi-mesure quand on est en voyage! C'est bien connu. J'ai cependant grandement apprécié le fait que personne n'assiste à une scène déplorable survenue dans la forêt! Le ridicule m'aurait foudroyé sur place, quoi qu'on en dise! Les nerfs un peu mis à rude épreuve par le silence pesant et la moiteur régnant dans ces sous-bois, je suis aux aguets et marche en chantonnant afin d'éloigner tout prédateur éventuel tapi dans les fourets. La végétation est dense, essentiellement composée de fougères géantes, de lianes, de mousse et de grands pins. Je suis perdue et ne retrouve pas le sentier sensé me reconduire à la route. C'est cet instant précis qu'a choisi une bestiole pour me poursuivre pendans plusieurs longues minutes, m'obligeant à taper un sprint entre les arbres pour tenter de la semer. Un loup? Un ours? Un écureuil? Que nenni! Une mouche à merde les amis! Oui! Une simple mouche à merde (mais une vraiment grosse!) a réussi à me faire prendre mes jambes à mon cou ! Son bourdonnement insupportable, son empressement à se jeter sur mon visage, à frôler mes oreilles... ç'en était trop! J'en aurais presque pleuré! Mais, je ne le répèterai jamais assez, le contexte initial était angoissant!
Bref! Un accueil des plus chaleureux, une petite gang de Français, dont une jeune fille, Soline, rencontrée un mois plus tôt en Gaspésie! Rien ne sert de courir le monde, il est incroyablement petit! Nous passons également deux jours ensemble et prenons le bateau pour Ucluelet, petite cité balnéaire à l'entrée du Pacific Rim national parc.
J'y séjourne pendant 3 jours et y rencontre Stephan, un Allemand d'une quarantaine d'année en voyage depuis 2 ans, avec qui je pars en stop le lendemain. Sur notre petit panneau: TOFINO!
C'est dans ce petit Eldorado que s'achèvera mon voyage 5 jours plus tard. Ils sont formels dans mon guide: "Tofino est peuplé d'un mélange de hippies, de surfeurs, d'activistes écologiques, de pêcheurs et d'autochtones". Touristes en sus et on y est!
Le gars à qui j'ai acheté ma tente quelques jours plus tôt m'a parlé d'un vague plan ou dormir pas cher à 30 minutes de marche du village. Toutes les auberges étant complètes et de toute façon hors de prix, je pars en quête de ce spot mystère. Mon seul indice: Mac Kenzie Beach Road... C'est peu... mais finalement suffisant. Tout le monde connaît Poole's land par ici! Un énorme site au milieu de la forêt pluviale (sorte de forêt tropicale), hébergeant une communauté hippie vivant de je ne sais trop quoi. J'entre là dedans, me demandant où je suis encore tombée lorsqu'un vieux garagiste rabibochant un camping-car du même âge m'interpelle:
-"Tu peux planter ta tente où tu veux. 10$ si tu files un coup de main d'1h par jour, 20 si tu travailles pas. Va t'installer!"
C'était donc vrai! Je sillonne le site, ravie, croisant une hippie me demandant un briquet pour brûler son PQ, un jeune homme guitare sur l'épaule et des tonnes de sourires. Je m'installe là:
(Et regretterai vite ce choix, mais c'est une autre histoire)
J'y rencontre très vite Camille, un jeune Français arrivé en même temps que moi. Nous sommes mis au travail tout de suite. Tâche du jour: ramasser du petit bois et l'entreposer au coin feu. Après une petite bière partagée et bien méritée, nous rejoignons la plage pour un énième coucher de soleil sur le Pacifique.
La balade du lendemain fut également sublime. Long beach: 11 kilomètres de sable blanc. Désert. Marée remontante.
(Gloups!)
Puis retour au camp pour notre tâche quotidienne... C'est une mission jardinage toute particulière qui nous attend, puisque nous n'avons planté ni des choux, ni des carottes si vous voyez ce que j'veux dire, dans les jardins communautaires! Nous y rencontrons Nico, autre Frenchie, clown activiste à ses heures, baroudeur en ce moment, avec qui nous formerons désormais un inséparable trio.
Réveil sous la pluie le lendemain! Aïe! La journée s'égrenne doucement... Ma tâche quotidienne est toute pourrie: trier une brouette de vis et de clous rouillés... je ne suis heureusement pas seule et papote à tire larigot avec qui veut bien m'écouter! La nuit qui suit est cauchemardesque! Un peu pompette, je m'en retourne à ma tente sous une pluie battante! Très mauvaise surprise, elle est pas du tout étanche ma super tente d'occaz'!! Une petite piscine s'est formée sous mon tapis de sol, inondant mon sac de couchage et il pleut sur ma tête! Je râle, je pouffe, j'évalue la galère... et fini par faire un gros tacos avec toutes mes affaires et tenter le tout pour le tout. Il fait nuit noire, il pleut à torrent, je cours comme une dératée (n'est ce pas maman!) jusqu'à la tente une place et demi de Camille, priant pour qu'il ne dorme pas! C'est qu'elle est quand même pas tout près sa tente! Il finit par me tirer d'affaire et je dors finalement au sec!
Poole's land c'est tout un tas de logements farfelus. Emplacements de tente et cabanes dans les arbres, salon avec poêle à bois dans un vieux van, abri de fortune dans la forêt. Un joyeux bric à brac qui se découvre au fur et à mesure du séjour tellement le site est étendu.
Et ma cabane dans les arbres... J'y ai passé une merveilleuse soirée avec Nico et un Allemand rencontré le jour même. Et nous avons fini par nous y endormir pour le restant de la nuit... La pluie tombant sur le toit, le feu craquant dans le poêle, quelques couvertures sur le sol. Il fait chaud, ça sent bon...
Je repars un peu tristoune... en stop avec l'ami Camille jusqu'à Naïnamo, où je reprends le ferry pour Vancouver, puis l'avion pour ma chère et tendre Montréal.
Bilan de cette incroyable aventure... 6500 km sur le pouce. Ca donne à peu près ça:
Un mois en compagnie de ma petite Flo. 3 semaines en solitaire. Deux voyages en un. Magiques, différents. Quelques amourettes, volontairement passées sous silence, car loin de moi l'idée de vouloir transformer ce blog en journal intime! Des centaines de rencontres, des drôles, des déchirantes, des absurdes, des inénarrables... mais toutes belles à leur façon. Et un retour. Nostalgie... un peu. Et excitation. Retour vers le "connu". Le confort aussi! La tente ça va un temps!
Et bientôt ma contrée natale. France... me revoilà dans un mois et demi.
En attendant, devinez quoi les amis!? J'ai retrouvé du travail à Montréal... au Petit Fourneau!! Round 3!
A bientôt!